Par
Marion Leo:
Le modèle du « temps de
travail basé sur la confiance » est-il positif pour les salariés,
permettant un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie privée, ou au
contraire négatif, conduisant à une surcharge de travail incontrôlée ? Ou
les deux à la fois ? Un conflit actuel chez Microsoft Deutschland, filiale
allemande du géant informatique américain, illustre la complexité du débat.
Selon la version en ligne du Spiegel (12.11), Microsoft entend fermer
prochainement trois sites, à Hambourg, Bad Homburg et Böblingen, employant 500
salariés. Ces derniers vont continuer à travailler pour l’entreprise mais à
domicile (télétravail). De nombreux salariés reprochent à Microsoft de vouloir,
par ce biais, se débarrasser de CE gênants et contourner la loi sur le temps de
travail. Car les salariés travaillant à la maison sont souvent amenés à
travailler 50 à 60 heures par semaine pour achever leur mission. Des reproches
récusés en bloc par la direction. (Réf. 130698)
Une culture du travail basée sur la
confiance. Chez Microsoft
Deutschland, qui emploie environ 2 700 salariés en Allemagne, la confiance est
présentée comme l’une des valeurs fondamentales de l’entreprise. « Chez
Microsoft, les valeurs comme la confiance et l’ouverture ne constituent pas de
simples paroles en l’air : elles sont vécues au quotidien », souligne
ainsi Brigittte Hirl-Höfer, directrice du personnel de Microsoft, ajoutant que
les modèles flexibles de temps de travail et le principe du « temps de
travail basé sur la confiance » permettent aux salariés de mieux concilier
travail et vie privée mais aussi d’organiser eux-mêmes en toute liberté leur
travail. « A l’aide des technologies de pointe de Microsoft, les salariés
peuvent en principe travailler à tout moment et partout. Chez Microsoft, ce qui
compte, c’est le résultat et non le temps passé en entreprise », déclare
Mme Hirl-Höfer. Selon elle, cette nouvelle culture du travail est très
appréciée des salariés. Et les nombreuses distinctions décernées à Microsoft
lui donnent raison. L’entreprise a été ainsi élue à plusieurs reprises
« meilleur employeur d’Allemagne » par l’Institut « Great Place
to Work ». La dernière distinction remonte à avril 2013.
De nombreuses heures supplémentaires non
payées. Mais ce
modèle a apparemment aussi ses limites. « Microsoft porte atteinte depuis
des années à la loi sur le temps de travail », affirme un salarié cité par
Spiegel online. Selon ce dernier, de nombreux salariés en télétravail réalisent
entre 50 et 60 heures par semaine pour remplir les objectifs ambitieux fixés
par l’entreprise. Les nombreuses heures supplémentaires ainsi réalisées ne sont
pas comptabilisées et demeurent impayées. Au printemps dernier, le CE du site
de Microsoft à Bad Homburg a soumis à la direction un projet d’accord
d’entreprise visant à mieux réglementer le temps de travail. Mais en juillet,
la direction a annoncé la fermeture des trois sites concernés. Selon Thomas
Mickeleit, porte-parole de Microsoft, cette fermeture n’a rien à voir avec les
critiques exprimées par les CE. Il s’agit d’une décision stratégique.
« Microsoft va à l’avenir se concentrer sur Munich, Cologne et
Berlin », précise le porte-parole. Selon lui, cette décision ne vise pas
non plus à réduire les coûts mais à permettre aux salariés d’avoir une plus
grande souplesse dans la gestion de leur travail. « Nos collaborateurs
apprécient beaucoup le modèle du temps de travail basé sur la confiance »,
assure le porte-parole.
Planet Labor, 13 novembre 2013, nº 130698
(7935) – www.planetlabor.com